Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/126

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obtenir, sans la ruine de celles qui le permettent. Que si vous ne voulez tout ce qu’ils desirent, plus vous leur avez donné de moyens pour vous ruiner. Et puis, pour couronner l’œuvre, quand ils sont à la fin de leurs souhaits, vous courez fortune, ou d’en estre méprisée, ou de vivre en une continuelle inquietude de leur inconstance. Quant aux autres qui sont dés le commencement rejettez, quels insupportables supplices sont ceux qu’ils vous donnent par leur opiniastreté ou par leur malice! par leur opiniastreté, ils vous vont poursuivant comme l’ombre suit le corps, ils ne vous éloingnent jamais que quand la nuit vous separe de tout autre, continuellement ils sont pendus à vos costez, vous n’avez jamais object devant les yeux que celuy de ces importuns, qui vous vous pressent de sorte, qu’il vous faut bannir des compagnies qui vous sont agreables, pour vous exempter de celles qui vous déplaisent. Que si en fin leur amour se perd, comme ils sont fort subjects à semblable changement, qu’est-ce que le dépit ne leur fait point dire? quelle vie sans reproche n’est point blessée de leurs calomnies? et en fin quels plus cruels tygres a créez la Nature, que l’inhumanité dont le desir de vengeance les arme contre nous?

– De sorte, interrompit Phillis, se tournant vers Astrée et Alexis, que pour conclurre avec Diane, les hommes sont ennuyeux en toute saison. – Et que nous n’aurons point, continua Astrée, les déplaisirs desquels elle nous menace,