Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/618

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

d’ouvrir les yeux lors qu’il s’estoit à peine relevé. Et n’eust esté que de fortune les rayons du soleil qui luy donnoient sur le visage l’esblouyrent de leur prompte clairté, il n’y a point de doute qu’elle l’eust recognu ; mais cela fut cause qu’elle ne peut que l’entrevoir comme une ombre, et lors qu’elle voulut tourner la teste pour le suivre des yeux, ses cheveux qui estoient, comme j’ay dit, pris à des ronces, Farresterent avec telle douleur qu’elle ne peut s’empescher de faire un cry assez haut, dont Phillis s’esveilla en sursaut. Et luy demandant quel sujet elle avoit de crier, Astrée luy monstra ses cheveux, n’ayant encores la force de parler, tant elle estoit estonnée de ce qui luy estoit advenu. Phillis en sousriant les luy desprit, et se voulant rasseoir en sa place, elle vit qu’Astrée s’estoit levée, et avoit laissé choir un papier. Elle fut curieuse de le ramasser, et de la suivre à quinze ou vingt pas du lieu d’où elles s’estoient levées. Et lors la triste Astrée s’estant assise contre un arbre, devint pasle outre mesure, et sembloit presque sur le poinct d’esvanouyr, dont Phillis estonnée courut incontinent là soustenir. Helas ! ma sœur, dit-elle à Phillis avec un grand souspir, helas ! qu’est-ce que j’ay veu ? Et lors elle se taisoit pour quelque temps, estant contrainte de souspirer, et