Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/963

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s’en va en diligence en Aquitaine, où sans difficulté il est receu, ses freres n’ayant point pensé à ce qu’Ætius luy, avoit persuadé. Ces trouppes estant separées de nostre armée, elle demeura si foible, que chacun fut d’opinion qu’il estoit bon de laisser aller Attila, disant qu’un capitaine prudent doit faire un pont d’or à son ennemy quand il s’en veut aller. Cest ennemy de l’empire eschappa donc des mains de Ætius de ceste sorte, et quoy que ce grand capitaine l’eust fait avec une bonne intention, si est-ce que depuis l’empereur le recogneut fort mal.

Or je suivis tousjours Ætius en toutes ces dernieres expeditions, sans que j’osasse partir de l’armée, tant à cause des diverses occasions de combattre qui se presentoient à toute heure, que pour l’expres commandement que la belle Eudoxe m’en faisoit, qui estoit bien aise de me tenir loing d’elle, de peur que l’ordinaire recherche que je luy faisois n’emportast quelque chose par dessus son dessein, ou que quelqu’un s’en prist garde. Et Dieu sçait quelle contrainte je me faisois et combien de fois je me resolus de partir, et mettre sous les pieds toute consideration de devoir et de discretion ! Mais quand je me representois les exprez cornmandements qu’elle me faisoit, je ne pus jamais y contreyenir. Je demeuray donc en ceste armée l’espace de douze ans, sur la fin desquels se donna la bataille dont je viens de vous parler. Il est vray que