Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/1053

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car outre l’accident qui a osté la beauté à Celidée, qui estoit la premiere cause de mon affection, encores le devoir m’obligeoit à rendre ce tesmoignage à Thamire du respect et de l’honneur auquel je luy suis tenu. Mais outre toutes ces considerations, m’estant sousmis au jugement de celle qui m’a condamné, si je n’eusse obey, ainsi que mes sermens m’obligeoient, j’eusse sans doute attiré la vengeance divine sur ma teste, et la hayne des hommes sur moy. Au contraire, en ce qui se presente d’Astrée, toutes choses me convient à ne changer jamais cette affection. Premierement sa beauté est telle qu’il n’y a rien qui l’esgale. – Elle en sera tant plus glorieuse, dit Hylas. – Il n’importe, respondit le berger, une fille un peu glorieuse est plus aymable. – Ouy, repliqua Hylas, pourveu que ce soit envers les autres, mais non pas envers nous ; et puis cette beauté n’est-elle pas subjecte à l’injure des années ?

– O Hylas ! dit Calidon, quand la vieillesse ostera la beauté à Astrée, l’aage qu’aura Calidon ne luy permettra guere de se soucier de la beauté. De plus les parens qui la gouvernent, et ceux qui ont puissance sur moy, appreuvent nostre affection. – Le contentement des parens, reprit Hylas, le plus souvent est cause que les filles s’opiniastrent à n’aimer point les personnes, qui autrement leur seroient tres-agreables, tant parce qu’elles pensent qu’on les vueille gagner en recherchant leurs parens, et non point elles, que