Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/1085

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par tous les sacrifices qu’il luy a faits pour ce suject. Vous voyez, belle bergere, comme je vous parle ouvertement de toutes choses, je le fais, parce que je vous estime tant que je voudrois vous voir entierement contente, s’il m’estoit possible, mais je vous supplie de ne me deceler point, afin que je puisse continuer à vous donner les advis que je croiray pouvoir conserver ou accroistre vostre contentement.

Il seroit mal-aisé de redire les remerciemens que cette bergere rendit à Leonide, ny les asseurances de service qu’elle luy fit avec tant de sermens de ne parler à personne de tout ce qu’elle luy diroit, que si la nymphe n’avoit point encores recogneu l’affection que cette bergere portoit à la druide, il luy eust esté impossible de n’en estre tres-asseurée. Et parce que discourant de cette sorte, elles s’estoient esgarées un peu du droict chemin, et que desja la troupe s’estoit fort avancée, elles voulurent prendre un sentier qui leur pouvoit faire gaigner le devant, mais de fortune elles ouyrent une voix que la bergere Astrée recogneut incontinent pour estre celle de Calidon, et parce qu’elle voulut se destourner pour ne le rencontrer, luy semblant que de l’escouter, elle offenceroit la memoire de Celadon, Leonide s’en prit garde, et ayant sceu que c’estoit ce berger, lequel Phocion luy vouloit faire espouser : Oyons, dit-elle, ce qu’il chante, car je m’asseure que c’est pour vous, et nous