Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/159

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Que c’est, sage Adamas, que des flatteries dont Amour abuse la jeunesse ! Je ne leus pas si tost cette lettre, qu’encore que je sceusse bien le contraire de ce qu’il m’escrivoit, toutesfois je ne consentisse incontinent à me laisser voir à luy. Il est vray que, craignant la legereté des hommes, et mesme des jeunes hommes, et particulierement celle d’Alcidon, de laquelle les tesmoignages estoient encores assez vifs en ma memoire, je fis dessein, au commencement, de ne me montrer point si volontaire à sa premiere supplication, mais de la laisser un peu en ceste incertitude, afin de luy en donner plus de desir, sçachant assez que l’amour aspire tousjours à ce qu’il croit luy estre le plus defendu. Et, en cette deliberation, je mis la main à la plume pour luy faire une desdaigneuse response, et telle que son silence de deux ans pouvoit meriter. Mais quelque demon, je ne sçay si je le dois dire bon ou mauvais, m’en empescha, me representant le merite d’Alcidon, sa jeunesse qui estoit excusable, les divers accidens qui estoient survenus durant ce temps-la, et, bref, les despits qu’une affection mesprisée fait concevoir en un jeune courage ; de sorte que, changeant mon premier dessein, je me resolus de le voir, en intention de luy faire apres payer cherement sa faute, si de fortune je le voyois bien embarqué à m’aymer. En cette resolution, je luy escrivis telles paroles :

==Response de Daphnide