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Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/210

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que, pour faire un bon contrat, il y faut tousjours des tesmoins ? – Amour, luy repliquay-je, nous serviroit de tesmoin. – Amour, dit-elle, ne peut pas estre tesmoin, car il faut qu’il soit juge, et peut-estre encore ne pourra-t’il pas estre juge, car il est dangereux qu’il ne soit luy-mesme complice de votre tromperie. – Si Amour ne peut pas estre tesmoin, repris-je lors, en ce qui est de l’amour, encor moins Diane, qui s’en est tousjours declarée ennemie. – Si je n’en puis estre tesmoin, dit-elle, j’en seray le denonciateur, pour en faire la punition. - Jugez, respondis-je, si vous estes en ce dessein, si je n’ay pas occasion de vous desirer hors de là.

Daphnide, qui n’avoit point encores parlé, nous interrompant, et s’adressant à moy :

– C’est moy, dit-elle, Alcidon, qui luy ay ordonné de se mettre où elle est, et le dessein qui me l’a fait faire, est tant à vostre advantage que, quand vous le sçaurez, vous en serez peut-estre glorieux. Car ce n’est pas pour tesmoigner contre vous, ni pour vous accuser, comme elle dit. Je suis trop-asseurée de la discretion d’Alcidon et de la puissance qu’il m’a donnée sur luy. Mais ayant plus de doute de moy que de vous, j’ay voulu qu’elle fust icy pour m’empescher, par sa presence, de faire plus que je n’ay resolu. – Si, de fortune, la bonne volonté que je vous porte me vouloit faire outrepasser ce que je dois, contre le dessein que j’en ay fait. I’advoue, madame, luy dis-je froidement, que ceste