Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/294

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qui me sembloient tousjours trop courtes quand il falloit nous separer. Il sçait bien que je ne mens pas, et que, plusieurs fois, pour luy donner ce tesmoignage de ma bonne volonté, je l’ay mis, et moy aussi, en de tres-grands hazards, et de la vie et de l’honneur. Il est vray, certes, que j’ay un tres-grand sujet de me louer de luy et de sa discretion, pouvant dire que, quelque commodité que je luy aye donnée, ou quelque familiarité que je luy aye fait paroistre, il n’a jamais monstré de vouloir outre-passer avec moy les bornes de l’honnesteté. Et encore que je croye bien qu’il pensoit que je ne le souffrirois pas, toutesfois je ne laisse de luy estre grandement obligée de ne m’avoir point donné sujet de me douloir de luy.

Vivant de cette sorte avec beaucoup de contentement, encore que je fusse en continuelle inquietude que le roy ne recogneust la continuation de cette bonne volonté, et que cela ne luy donnast occasion de changer, comme il avoit desja fait au desavantage de quelques autres, je m’apperceus qu’il y avait quantité de dames principales qui toutes aspiroient de posseder ce grand prince, fust pour la gloire de commander a celuy à qui tant de milliers d’hommes vaincus obeyssoient, fust pour l’esperance de venir à la couronne, si l’amour le convioit de les espouser.

Et, entre celles qui tenoient le premier rang, j’en remarquay deux : l’une qui se nommait Clarinte, et