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Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/42

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tous les devoirs de la loyauté. Et ceste consideration eust bien eu tant de force sur luy, que jamais il n’eust permis que ce jeune berger fust entré en sa maison, sous le nom et les habits de sa fille Alexis, si l’Oracle ne luy eust promis que, quand Celadon auroit son contentement, sa vieillesse aussi seroit contente pour jamais ; car y estant si fort interessé, il choisit plustost la peine de veiller de prés les actions de l’une et de l’autre, que de perdre le bien que le Ciel luy en promettoit. Et parce qu’il ne pouvoit tousjours estre aupres d’elles, d’autant que les affaires et domesticques et publicques l’appelloient bien souvent ailleurs, il avoit commandé à Paris de ne les abandonner que le moins qu’il pourroit, de peur qu’Alexis ne s’ennuyast si elle demeuroit seule.

Ce matin, aussi tost qu’il sceut qu’elles estoient hors du logis, et que Paris trop long à s’habiller n’estoit avec elles, il sortit incontinent apres, et suivant sa niepce, fut presque aussi tost qu’elle dans le boccage, où Alexis avoit desja quelque temps entretenu ses pensées. Le bruit que la nymphe fit en arrivant fut cause que Celadon tourna le visage vers elle, et qu’il apperceut la venue du druide, à qui elle portoit un si grand respect, qu’encores qu’elle eust mieux aimé demeurer seule pour avoir plus de commodité de penser en Astrée, si est-ce que feignant le contraire, elle l’alla trouver, et luy donner le bon jour, avec un visage