Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/435

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puis asseurer, belle bergère, dit-elle, prenant Astrée par la main, que j’ay bien fait pour le moins la moitié du chemin, car je ne scay comment j’ay esté toute la nuict embrouillée parmy les discours que nous eusmes au soir, de telle sorte que je ne me suis peu endormir que quand le jour a paru.

Leonide, pour donner commodité à ceste chère sœur d’entretenir plus particulièrement Astrée, prenant Diane et Phillis par la main, les retira vers la fenestre qui avoit la veue du costé de leur hameau, et l’ouvrant, s’y appuyerent toutes trois, cependant qu’Alexis faisant asseoir Astrée sur son lict, et la tenant tousjours par la main, fut presque transportée de l’extreme affection de la luy baiser. En fin, craignant de luy donner cognoissance de ce qu’elle vouloit cacher, elle se retint et se contenta de la luy serrer et presser doucement entre les siennes deux.

Et après avoir demeuré quelque temps muette : Je vous jure, luy dit-elle, belle bergère, que toute la nuict j’ay pensé en vous, et aux discours que vous me tintes. Mais dites-moy, je vous supplie, est-il bien possible que Phocion (ainsi que Lepnide m’asseuroit au soir) vueille vous contraindre de vous marier contre vostre gré ? – Madame, repondit Astrée, il est vray qu’il a ceste humeur, mais il est vray aussi qu’il n’y parviendra jamais. Non pas que j’aye la hardiesse de luy contredire tout ouvertement, mais je traitteray bien de sorte Calidon que je