Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/582

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grande familiarité aupres d’elle, et qu’il luy racontoit ordinairement tout ce qu’il avoit veu au lieu d’où il venoit. A ce coup, pour ne pas perdre sa coustume, apres luy avoir faict la response de la venerable Chrisante, il adjousta : Mais je vous asseure, madame, que horsmis vous, je ne vis jamais rien de si beau qu’Astrée et Diane.

Galathée qui estoit bien aise de le faire parler, et d’apprendre tousjours quelque nouvelle de ces bergeres, luy semblant que c’éstoit quelque, chose qui touchoit bien à son aimé Celadon, et mesme qu’elle n’avoit plus de moyen de sçavoir ce qu’il estoit devenu que par elles, elle luy dit tout haut, et devant Damon mesme : Et quoy ! Lerindas (c’éstoit ainsi qu’il s’appelloit), trouves-tu ces bergeres si belles que tu les vueilles preferer à mes nymphes ? – Ce n’est pas moy, dit-il, qui les prefere, c’est la verité. – Mais, repliqua la nymphe, comment veux-tu que nous croyons que des filles de village soient si belles ? – Madame, dit-il, je vous jure que si j’estois chevalier, je maintiendrois leur beauté par tout le monde ; et si vous les aviez veues, je m’asseure que pour vaillante que vous fussiez, vous ne voudriez pas entrer en champ clos avec moy sur une si mauvaise querelle.

Chacun se mit à rire, et Galathée : Mais viens-ça, Lerindas, dit-elle en sousriant, laquelle te plaist le plus ? – Sans doute, respondit-il, Astrée est