Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/631

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car quelque rigueur qu’elles nous peussent faire ressentir, elles ne laisseroient d’estre non seulement, servies, mais adorées de chacun. Ces paroles ne l’estonnèrent aucunement ; au contraire, avec un œil riant, elle me respondit : Et quoy, seigneur chevalier, on use de flatterie aussi bien en Gaule que parmy les Romains ? je croyois que ce ne fust que delà les Alpes que les hommes s’en sceussent aider, mais, à ce que je voy, ces Gaulois mesme, qu’on dit parler avec le cœur, en ont aussi bien appris l’usage que les autres peuples. – Madame, luy respondis-je, je ne sçay si parmy vostre nation on appelle la verité flatterie, ou si, en vostre langage, flatterie est à dire verité, tant y a que je vous jure par nostre grand Tautates, qui est bien le plus grand serment que je puisse faire, n’avoir jamais rien veu de si beau que vostre visage, ny de si parfaict que vostre bel esprit.

Or, ma maistresse, nous continuasmes de sorte ce discours, qu’avant que de nous separer, je luy fis entendre le desir que j’avois de luy rendre particulierement service. Peut-estre trouverez-vous estrange que d’abord je luy fisse ceste declaration : mais outre que mon humeur n’est pas de faire longuement l’amoureux transy, ny de permettre à mes yeux de demander ce que ma langue peut bien dire, encore ay-je tousjours creu que les dilayemens minent plustost un affaire, qu’ils ne le perfectionnent, et mesme ceux