Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/866

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Phillis qui vid bien que le druide le proposoit avec raison, et qui, outre cela, se faschoit d’employer le temps à quelqu’autre entretien qu’à celuy de son bien-aymé Lycidas, duquel il sembloit que les soings qu’elle rendoit à Diane, encore que feints, la divertissoient plus qu’elle n’eust desiré : – Non non, ma sœur, dit-elle, il faut surprendre l’ennemy quand il y pense le moins. Et haussant la voix : Ma maistresse, dit-elle à Diane, ceste compagnie vous demande, et je vous supplie de venir, sans vous arrester aux discours de celuy qui parle à vous, car je m’asseure qu’il ne vous dit rien à mon advantage. Silvandre estoit celuy qui l’entretenoit, et qui pour ne perdre le moindre moment, ne laissoit aucune occasion d’entretenir Diane, si bien qu’ayant veu Paris un peu esloigné avec la nymphe Leonide, il s’estoit approché d’elle et ne faisoit presque que commencer, lors que Phillis l’interrompit. Dequoy tout fasché : Je m’estonnois bien, dit-il, si ces deux mauvais demons qui me tourmentent continuellement, l’un pour le moins ne se trouvoit point icy pour interrompre mon bon-heur. – Vostre bon-heur, répondit Phillis, est tantost bien prés de sa fin, et le mien, au contraire, bien prés de sa supreme felicité. Car, ma maistresse, continua-t’elle, se tournant vers Diane, vous estes requise par cette bonne compagnie de juger le merite du service de Silvandre et de