Page:Uzanne - Son altesse la femme.djvu/168

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sades friponnes, se livroit aux fantaisies du sort, s’abandonnoit à l’ombre de l’amour, quittoit un amant pour s’attacher à un autre, sans transition, semblant vouloir s’éviter elle-même pour mieux poursuivre le plaisir avec une opiniâtreté de succube intellectuel. Dans cette vie oîutoujours sa ; curiosité palpite à la recherche de vibrations d’amour, rien ne la satisfait, rien ne l’apaise, rien ne la traverse d’une commotion réelle, rien ne la charme, rien ne la fixe sur un îlot de plaisance ou de bonheur. Lasse tou- jours, mais toujours éveillée, avide de nouveau, de surhumain, d’antiphysique, elle prodigue la tenta- tion, distribue ses charmes et se prête avec cynisme à toutes les complaisances, à tous les essais, à toutes combinaisons erotiques qui eussent pu donner une apparence de corps à ses insaisissables conceptions de libertinage.

On pourroit dire de la Caillette qu’elle perdit ses mœurs sans se corrompre ; elle fut semblable à ces courtisanes qui demeurent vierges d’âme dans leur infamie ; il lui resta l’ingénuité, le sens délicat, les grâces naïves et les enfantillages charmants de la jeune fille joints aux roueries acquises par l’usure de ses amants. Ce fut une jolie fleur d’ennui battue par tous les vents des caprices, arrosée par les eaux croupissantes du siècle, sans tuteur ni culture. Qui- conque se fût avisé de faire l’autopsie de la Caillette auroit trouvé peu de cervelle ou de cervelet, mais