Halévy est un penseur, un curieux de toutes les choses de l’esprit, un chercheur ; il cherche en musique des formules nouvelles, il satisfait ses fantaisies et se divertit en composant. Halévy est un savant musicien, mais il a aussi ce qui ne s’acquiert pas, du style, des chants pleins de nouveauté, de grâce et de distinction, et surtout, au besoin, de la sensibilité, de la tendresse et de l’amour. Halévy n’inspire à tous ceux qui le connaissent qu’un sentiment, l’amitié ; s’il n’eût pas obéi à sa vocation de musicien, c’eût été un écrivain plein d’idées d’esprit, plein de respect pour la langue française, qu’il manie avec art et avec originalité.
M. Meyerbeer débuta en France presque à la même époque qu’Halévy ; mais il avait déjà fait représenter, en Italie, six opéras avec succès :
Romilda c Costanza, Semiramide riconosciuta, Emma di Rosburgo, Margherita d’Anjou, l’Esule di Granata, il Crociato.
Le style de Meyerbeer était-il alors le style de l’école italienne, ou bien trouvait-on déjà dans le compositeur allemand la puissance et l’originalité qui ont donné en France à tous ses ouvrages un si grand éclat ?
M. Meyerbeer apprend à Milan par les journaux français que le Crociato allait être exécuté à Paris ; le rôle principal était destiné à mademoiselle Schiasetti, contralto de second ordre ; le rôle de soprano aigu était destiné à madame Pasta, qui n’aurait pu le chanter qu’en le transposant d’un bout à l’autre ; le rôle de ténor était destiné à Curioni, ténor baryton tout à fait usé. Ceux qui connaissent M. Meyerbeer pourront seuls com-