Page:Véron - Mémoires d’un bourgeois de Paris, tome 1.djvu/312

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plus violentes, j’ai regardé comme un impérieux devoir d’être envers lui vrai et juste ; j’ai interrogé çà et là, j’ai puisé aux sources, j’ai recherché toutes les preuves, pour ne produire ici que des documents à l’abri de toutes controverses et de toutes discussions ; j’ai suivi le grand exemple qui m’a été donné dans ces biographies si consciencieuses, fruits de tant d’investigations, dont la plume spirituelle et savante de mon ami Sainte-Beuve enrichit chaque jour l’histoire et la littérature.

J’ai pour ainsi dire voulu observer et surprendre M. Guizot dès l’enfance, et pour arriver à bien connaître le fils, j’ai voulu faire connaissance avec le père ; j’ai voulu pénétrer au milieu de cette famille, étudier le climat moral sous lequel grandit et s’éleva l’historien, l’homme d’État.

Je vais donc d’abord parler ici de la famille de M. Guizot.

Le père de M. Guizot était avocat ; il se distingua par son talent dans sa profession. Dans les barreaux de province, aussi bien que dans celui de Paris, l’usage voulait alors que les avocats écrivissent leurs plaidoyers ; on n’improvisait point. M. Guizot père écrivait donc ses plaidoyers, comme ses confrères ; ceux qu’on a conservés de lui témoignent d’une raison ferme, d’un esprit juste et pénétrant, d’une logique pressante ; c’était l’œuvre d’un habile écrivain et d’un lettré.

La mère de M. Guizot, une demoiselle Bonicel, ne se faisait pas moins remarquer par son esprit, par sa haute intelligence, que par l’énergie de son caractère. C’était une jeune personne d’une beauté charmante, d’un grand goût pour la bonne compagnie ; elle aimait les arts et