Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 1, 1931.djvu/85

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Phèdre

Je crois à chaque instant que je vais souffrir… Mais ne me parle pas, je te prie, de ce que j’ai perdu. Laisse ma mémoire à soi-même. Laisse-lui son soleil et ses statues ! Ô quel contraste me possède ! Il y a peut-être, pour les souvenirs, une espèce de seconde mort que je n’ai pas encore subie. Mais je revis, mais je revois les cieux éphémères ! Ce qu’il y a de plus beau ne figure pas dans l’éternel !

Socrate

Où donc le places-tu ?

Phèdre

Rien de beau n’est séparable de la vie, et la vie est ce qui meurt.

Socrate

On peut le dire… Mais la plupart ont de la Beauté je ne sais quelle notion immortelle.

Phèdre

Je te dirai, Socrate, que la beauté, selon ce Phèdre que je fus…