Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 2, 1931.djvu/67

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autres que celui-ci, où la même idée de la solitude attire invinciblement chacun de tous ces êtres absorbés. Nous serons tout à l’heure dans cet endroit digne des morts. C’est une ruine botanique. Nous y serons un peu avant le crépuscule. Voyez-nous, marchant à petits pas, livrés au soleil, aux cyprès, aux cris d’oiseau. Le vent est froid au soleil, le ciel trop beau parfois me serre le cœur. La cathédrale cachée sonne. Il y a, par-ci, par-là, des bassins ronds et surhaussés qui me viennent à la ceinture. Ils sont pleins jusqu’à la margelle d’une eau noire et impénétrable, sur laquelle sont appliquées les énormes feuilles du Nymphea Nelumbo ; et les gouttes qui s’aventurent sur ces feuilles roulent et brillent comme du mercure. M. Teste se laisse distraire par ces grosses gouttes vivantes, ou bien il se déplace lentement entre les « planches » à étiquettes vertes, où les spécimens du règne végétal sont plus ou moins cultivés. Il jouit de cet ordre assez ridicule et se complait à épeler les noms baroques :

Antirrhinum Siculum
Solanum Warscewiezit ! ! !

Et ce Sisymbriifolium, quel patois !.. Et les Vul-