Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 2, 1931.djvu/77

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C’est ce que j’ai d’inhabile, d’incertain qui est bien moi-même,

Ma faiblesse, ma fragilité…

Les lacunes sont ma base de départ. Mon impuissance est mon origine.

Ma force sort de vous. Mon mouvement va de ma faiblesse à ma force.

Mon dénuement réel engendre une richesse imaginaire ; et Je suis cette symétrie ; je suis l’acte qui annule mes désirs.

Il y a en moi quelque faculté plus ou moins exercée, de considérer, — et même de devoir considérer — mes goûts et mes dégoûts comme purement accidentels.

Si j’en savais plus, peut-être verrais-je une nécessité — au lieu de ce hasard. — Mais voir cette nécessité, cela est encore distinct… Ce qui me contraint n’est pas moi.

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Soumets-toi tout entier à ton meilleur moment, à ton plus grand souvenir.

C’est lui qu’il faut reconnaître comme roi du temps,