Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 3, 1933.djvu/130

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Implacablement au ciel l’âme
Que mon sein ne peut plus garder !

Qui me parle, à ma place même ?
Quel écho me répond : Tu mens !
Qui m’illumine ?... Qui blasphème ?
Et qui, de ces mots écumants,
Dont les éclats hachent ma langue,
La fait brandir une harangue
Brisant la bave et les cheveux
Que mâche et trame le désordre
D’une bouche qui veut se mordre
Et se reprendre ses aveux ?

Dieu ! Je ne me connais de crime
Que d’avoir à peine vécu !...
Mais si tu me prends pour victime
Et sur l’autel d’un corps vaincu
Si tu courbes un monstre, tue
Ce monstre, et la bête abattue,
Le col tranché, le chef produit
Par les crins qui tirent les tempes,
Que cette plus pâle des lampes
Saisisse de marbre la nuit !