Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 3, 1933.djvu/53

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Plate, elle me murmure une musique telle

Que le calme de l’onde en fait de sa fureur, Quand elle se rapaise aux pieds d’une mortelle

Mais qu’elle se réserve un retour de terreur.

En vain j’entends monter contre ma face auguste Ce murmure de crainte et de férocité :

A l’image des dieux la grande âme est injuste Tant elle s’appareille à la nécessité !

Des douceurs de l’amour quoique parfois touchée, Pourtant nulle tendresse et nuis renoncements

Ne me laissent captive et victime couchée Dans les puissants liens du sommeil des amants !

Baisers, baves d’amour, basses béatitudes, O mouvements marins des amants confondus,

Mon cœur m’a conseillé de telles solitudes,

Et j ’ai placé si haut mes jardins suspendus

Que mes suprêmes fleurs n’attendent que la foudre Et qu’en dépit des pleurs des amants les plus beaux A mes roses, la main qui touche tombe en poudre Mes plus doux souvenirs bâtissent des tombeaux !