Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 3, 1933.djvu/73

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Souvenir, ô bûcher, dont le vent d’or m’affronte,
Souffle au masque la pourpre imprégnant le refus
D’être en moi-même en flamme une autre que je fus…
Viens, mon sang, viens rougir la pâle circonstance
Qu’ennoblissait l’azur de la sainte distance,
Et l’insensible iris du temps que j’adorai !
Viens consumer sur moi ce don décoloré
Viens ! que je reconnaisse et que je les haïsse,
Cette ombrageuse enfant, ce silence complice,
Ce trouble transparent qui baigne dans les bois…
Et de mon sein glacé rejaillisse la voix
Que j’ignorais si rauque et d’amour si voilée…
Le col charmant cherchant la chasseresse ailée.

Mon cœur fut-il si près d’un cœur qui va faiblir ?

Fut-ce bien moi, grands cils qui crus m’ensevelir
Dans l’arrière douceur riant à vos menaces…
Ô pampres ! sur ma joue errant en fils tenaces,
Ou toi… de cils tissue et de fluides fûts,
Tendre lueur d’un soir brisé de bras confus ?