Page:Valéry - Introduction à la méthode de Léonard de Vinci, 1919.djvu/88

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coup toutes les prétendues difficultés tenant à son opposition ou à son rapprochement avec cette nature, jamais définie, et pour cause : c’est ornement. Qu’on veuille bien se rappeler successivement les groupes de courbes, les coïncidences de divisions couvrant les plus antiques objets connus, les profils de vases et de temples ; les carreaux, les spires, les oves, les stries des anciens ; les cristallisations et les murs voluptueux des Arabes ; les ossatures et les symétries gothiques ; les ondes, les feux, les fleurs sur la laque et le bronze japonais ; et dans chacune de ces époques, l’introduction des similitudes des plantes, des bêtes et des hommes, le perfectionnement de ces ressemblances : la peinture, la sculpture. Qu’on évoque le langage et sa mélodie primitive, la séparation des paroles et de la musique, l’arborescence de chacune, l’invention des verbes, de l’écriture, la complexité figurée des phrases devenant possible, l’intervention si curieuse des mots abstraits ; et, d’autre part, le système des sons s’assouplissant, s’étendant de la voix aux résonances des matériaux, s’approfondissant par l’harmonie, se variant par l’usage des timbres. Enfin qu’on aperçoive le parallèle progrès des formations de la pensée à travers les sortes d’onomatopées psychiques primitives, les