Page:Valéry - Introduction à la méthode de Léonard de Vinci, 1919.djvu/98

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trop simples au sujet de la constitution de la matière, non moins que de la formation des idées. Les rêveries substantialistes autant que les explications dogmatiques disparaissent, et la science de former des hypothèses, des noms, des modèles, se libère des théories préconçues et de l’idole de la simplicité.

Je viens d’indiquer, avec une brièveté dont le lecteur différent me saura gré ou m’excusera, une évolution qui me paraît considérable. Je ne saurais mieux l’exemplifier qu’en prenant dans les écrits de Léonard lui-même une phrase dont on dirait que chaque terme s’est compliqué et purifié jusqu’à ce qu’elle soit devenue une notion fondamentale de la connaissance moderne du monde : « L’air, dit-il, est rempli d’infinies lignes droites et rayonnantes, entre-croisées et tissues sans que l’une emprunte jamais le parcours d’une autre, et elles représentent pour chaque objet la vraie forme de leur raison (de leur explication). » L’aria e piena d’infinite linie rette e radiose insieme intersegate e intessute sanza ochupatione luna dellaltra rapresentano aqualunche obietto laurea forma della lor chagione (Man. A, fol. 2). Cette phrase paraît le premier germe de la théorie des ondulations lumineuses, surtout si on la rap-