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Page:Valéry - Variété IV, 1948.djvu/252

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peut-elle être autre chose, et puis-je rien faire de plus sûr et de plus sage ? Mais ce qui est sûr et qui est sage n’est pas toujours le plus expédient ni le plus clair, et je m’avise que je dois à présent, pour construire une notion de l’Esthétique qui me rende quelque service, tenter de résumer en peu de paroles l’objet commun de tous ces produits de l’esprit. Ma tâche est de consumer cette matière immense... Je compulse ; je feuillette... Qu’est-ce donc que je trouve ? Le hasard m’offre d’abord une page de Géométrie pure ; une autre qui ressortit à la Morphologie biologique. Voici un très grand nom­bre de livres d’Histoire. Et ni l’Anatomie, ni la Physiologie, ni la Cristal­lographie, ni l’Acoustique ne manquent à la collection ; qui pour un chapitre, qui pour un paragraphe, il n’est presque de science qui ne paye tribut.

Et je suis loin de compte, encore !... J’aborde l’infini indénombrable des techniques. De la taille des pierres à la gymnastique des danseuses, des secrets du vitrail au mystère des vernis de violons, des canons de la fugue à la fonte de la cire perdue, de la diction des vers à la peinture encaustique, à la coupe des robes, à la marqueterie, au tracé des jardins, – que de traités, d’albums, de thèses, de travaux de toute dimension, de tout âge et de tout format !... Le dénombrement cartésien devient illusoire, devant cette prodigieuse diversité où le tour-de-main voisine avec la section d’or. Il semble qu’il n’y ait point de limites à cette prolifération de recherches, de procédés, de contributions, qui, toutes, ont cependant quelque rapport avec l’objet auquel je pense, et dont je demande l’idée claire. A demi découragé, j’abandonne