Page:Vallès - L’Insurgé.djvu/148

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tasié, la voûte des cathédrales et va chercher le ciel.


Ayant trouvé le temps, entre ses maladies et ses chômages, d’étudier les grands livres, il en a exprimé le suc et mâché la moelle. Cela le soutient, comme du sang de bœuf bu chaud à l’abattoir. Vivant de sa passion — le cœur soutenant la poitrine ; ayant même tiré de son mal une théorie qui, sans qu’il le sache, est la fille de sa souffrance et fait peur sur ses lèvres : « Le capital mourrait si, tous les matins, on ne graissait pas les rouages de ses machines avec de l’huile d’homme. Il faut, à ces bêtes de fonte et d’acier, le pansage et la poussée de l’ouvrier. »


À lui aussi, il faudrait le pansage de ses bronches, qui suent rouge, et quelques gouttes de cette huile qu’on appelle le vin dans sa charpente détraquée.

Il n’y faut point songer ! il mange à peine et boit de l’eau. Il est feuillagiste, et le feuillage ne va pas. La manipulation des outils de travail achève de lui ronger ce qu’il a de vie — le poison aide la famine.


Mais cet autre poison qu’on appelle le gaz, et les émanations lourdes qui se dégagent des foules entassées dans les locaux trop étroits, combattent le mal par le mal. Il prend la fièvre là-dedans, et la fièvre le galvanise, le relève, et l’emporte haut.

Après tout, il aura eu son comptant d’existence ! Il