Page:Vallès - L’Insurgé.djvu/179

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Moselle ; ils me fourrent dans l’œil le doigt de Carnot et le panache de Kléber !


Nous avons pris des bandes de toile, sur lesquelles on a écrit avec une cheville de bois trempée dans une écuellée d’encre : « Vive la paix ! » et nous avons promené cela à travers Paris.

Les passants se sont rués sur nous.


Il y avait des gens de police parmi les agresseurs, mais ils n’avaient pas eu à donner le signal. Il leur suffisait de suivre la fureur publique et de choisir alors, dans le tas, ceux qu’ils reconnaissaient pour les avoir vus dans les complots, aux réunions, le jour de la manifestation Baudin ou de l’enterrement de Victor Noir. Sitôt l’homme désigné, la canne plombée et le casse-tête s’en payaient ! Bauer a failli être assommé, un autre jeté au canal !


Il me prend parfois des repentirs lâches, des remords criminels.

Oui, il m’arrive au cœur des bouffées de regret — le regret de ma jeunesse sacrifiée, de ma vie livrée à la famine, de mon orgueil livré aux chiens, de mon avenir gâché pour une foule qui me semblait avoir une âme, et à qui je voulais faire, un jour, honneur de toute ma force douloureusement amassée.

Et voilà que c’est sur les talons des soldats qu’elle marche à présent, cette foule ! Elle emboîte le pas aux régiments, elle acclame des colonels dont les