Page:Vallès - L’Insurgé.djvu/224

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

même sur l’escalier : se faire tuer au besoin ! Ils nous ont trouvés mous, je crois, parce que nous ne leur avons pas dit de charger.

— Pendant que nous les tiendrons en respect, nom de Dieu ! l’un de vous ira chercher du renfort ! criait le caporal en tordant ses moustaches.


Du renfort ?… Trouverions-nous une compagnie tout entière pour nous suivre jusqu’au bout, nous qui sommes pourtant applaudis tous les soirs ?

Trois ou quatre fois, il a été décidé qu’on descendrait en masse sur l’Hôtel de Ville.

La moitié de la salle avait levé les mains ; on avait proféré des menaces ; nous avions déjà peur d’être entraînés trop loin.


Trop loin !… Jusqu’au coin de la rue seulement, où le faisceau s’éparpillait, nous laissant à trois ou quatre pour aller faire peur au Gouvernement.

Nous prenions l’omnibus — trois sous de fichus ! — et promenions mélancoliquement notre requête ou notre ultimatum à travers les corridors mal éclairés : trouvant visage de bois quand nous arrivions au cabinet d’Arago, visage de fer quand nous nous fâchions. Les sentinelles remuaient, dans l’obscurité, sur le signe de quelque civil à écharpe et à grandes bottes.


J’ai cru qu’être chef de bataillon, cela doublerait ma force de tribun, qu’il serait bon qu’à la fin de