Page:Vallès - L’Insurgé.djvu/282

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Plusieurs de ceux qui, depuis la veille, à l’aube, étant sur pied, ont fait leur devoir et la corvée : qui, après avoir harcelé de leur baïonnette le poitrail des chevaux montés par les gros épauletiers de Vinoy, ont, le soir, taillé le pain, distribué les vivres : plusieurs de ceux-là ont arrosé leur charcuterie et leur lassitude d’un peu de vin qui les a ragaillardis — et ils ont une pointe.


Mais pas un qui ne puisse sauter sur son fusil, viser, et faire feu, si Moreau, ou Durand, ou Lambert — voilà les noms de leurs généraux ! — se mettait à crier que Ferry revient avec un Ibos et un 106e, comme au 31 octobre.

— Aux armes !

Tous laisseraient le gobelet d’étain pour prendre l’écuelle à cartouches, et piqueraient, non plus dans le petit-salé de faubourg avec leur couteau de treize sous, mais dans le gras-double des bourgeois, avec la fourchette à une dent qui est au bout du flingot.


Mais, pour l’instant, rien qui sente la colère, ni même qui embaume l’enthousiasme !

On dirait d’un régiment qui a reçu permission de pioncer sur le perron d’une préfecture, faute d’assez de billets de logement, et à qui on a dit de s’organiser, tant bien que mal, pour la soupe, le feu et la chandelle.