Page:Vallès - L’Insurgé.djvu/304

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Il a tiré de sa poche quelques papiers pleins de taches, sentant la colle, et me les a remis.

— Pourrez-vous lire ? C’est poissé de fautes, n’est-ce pas ? Mais dites-moi tout de même ce que vous en pensez !


Ce que j’en pense ! Je pense, en toute conscience, que cet « autonome » généralement quelconque à la trogne comique, que cet orateur de mastroquet, a l’intelligence plus nette, l’esprit plus haut que les savants au teint jaune, à l’allure vénérable, que j’ai vus pâlir sur les vieux livres, et chercher dans les bibliothèques les lois de la richesse, la raison de la misère.

Il en sait plus long qu’eux, plus long que moi ! Il y a, dans les feuillets froissés et sales qu’il m’a donnés, tout un plan d’éducation qui renverse par sa sagesse les catéchismes des Académies et des Grands Conseils.


Rouiller me suit des yeux.

— Avez-vous vu le passage où je demande que tous les enfants aient leur chopine dès quinze ans ? Eh ! bien, mon cher, voulez-vous que je vous dise ?… Si j’ai pu me faire quelques idées et les aligner en rangs d’oignons, c’est que j’ai toujours gagné assez pour boire mon litre, et prendre mon café avec la consolation ! On dit que j’ai tort de me piquer le nez ? Mais, sacré nom ! c’est quand ce nez-là me