Page:Vallès - L’Insurgé.djvu/82

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gique, les autres m’en auraient voulu d’introduire la mort dans le duel de presse et m’eussent calomnié, pour que je ne plantasse pas, sur le chemin du boulevard, ce jalon sanglant.


Heureusement, je suis fort, et si mes conditions avaient été repoussées, j’aurais endommagé la binette du provocateur et je lui aurais tiré les moustaches, jusqu’à ce que la foule s’attroupât !

Aux faubouriens et aux sergents de ville accourus, j’aurais crié :

— Il voulait me saigner, comme un cochon, parce qu’il sait le sabre… je lui propose la partie à bout portant, et il cane ! Laissez-moi donc taper dessus !


On m’aurait peut-être fait assassiner, par mégarde, fait casser les côtes ou les reins, sournoisement, pendant le transfert au commissariat, sinon au poste, dans un tumulte de violon, où un faux ivrogne eût soulevé la querelle, et où la clef du geôlier, ayant l’air de nous séparer, m’aurait défoncé la poitrine.


Rien de tout cela ne s’est passé.

Je n’ai, par bonheur, confié à personne cette rumeur venue jusqu’à moi. Si j’en avais ouvert la bouche, les camarades n’eussent pas manqué de prétendre que j’avais inventé le colonel pour inventer le duel à mort.

Quelle misère !