Page:Vallès - Le Bachelier.djvu/247

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Trente francs par mois. Je me nourris moi-même. J’ai une demi-heure de libre à midi pour déjeuner.

Il n’y a pas de voiture, comme chez Entêtard, ni d’écurie ; mais je préférerais qu’il y eût une écurie, l’odeur contrebalancerait celle de la classe. Oh ! s’il y avait une écurie !

J’étouffe, mon cœur se soulève ; cette atmosphère me fait mal !

Mais j’y mets du courage, et je reste mon mois, exact comme une pendule. Je viens avant l’heure, je pars après l’heure.

Le soir, je pleure de dégoût en rentrant dans mon taudis, mais je me suis juré d’être brave.


Mes élèves ont de six à dix ans.

Je dis Ba, Be, Bi, Bo, Bu aux uns. Je fais faire des bâtons aux autres.

Cette odeur !

J’ouvre la porte de temps en temps, mais M. Benoizet et sa femme s’injurient dans le corridor et il faut fermer bien vite.

Aux plus âgés, je fais réciter : A est long dans pâte et bref dans patte ; U est long dans flûte et bref dans butte.


C’est le 30… M. Benoizet m’appelle.

— Monsieur, voici vos appointements.

Ah ! celui-là est un honnête homme !

— Voulez-vous me donner un reçu ?

Je le donne.