Page:Vallès - Le Bachelier.djvu/289

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Elle avait quelquefois peur de son mari.

Peur ? — Elle faisait semblant, je crois, pour aiguiser ma joie. Elle voyait bien que je ne redoutais pas le danger et que le fantôme du péril, au contraire, attisait mes désirs et mon orgueil.

Peur ? — Mais elle s’affichait à mon bras !

Au théâtre, elle se frottait tout contre moi, elle avait ses cheveux qui touchaient les miens…

Elle voulut une fois aller aux cafés du quartier, et se fâcha parce que je ne la tutoyais pas.

Patatras !


J’étais dans mon taudis. On a fait du train dans l’escalier.

« Que demandez-vous ? criait l’hôtelier. Vous demandez M. Vingtras ? Je vous dis : c’est ici ; vous me dites : non ! Je vous dis : si ! Je sais bien les gens qui logent chez moi. — Monsieur Vingtras !

— Qu’y a-t-il ?

— Une dame qui vous cherche. »

Par la cage de l’escalier j’ai vu une tête passer, mais qui a tout de suite disparu !… J’ai entendu un bruit de soie, des pas précipités… Une robe fuyait dans la rue.

Je cours, en me cachant derrière les gens et les voitures.

Cette robe, ce châle !… C’est Elle, la femme au rire d’argent, aux cheveux d’or, au peignoir bleu…