Page:Vallès - Le Bachelier.djvu/296

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la cocarde de l’insouciance. J’ai jeté je ne sais quelle ironie en entrant.

L’homme aux lunettes m’a regardé d’un air glacial et a fait un signe de mépris. Il m’a même dit un mot sévère, je crois.

C’est bon ! Respect à la discipline ! Je vais être grave et raide, si je puis, comme Robespierre.


Il y a convocation mystérieuse pour ce soir.

Nous nous rendons dans une chambre au fond d’une vieille cour, et là, nous recevons la nouvelle que c’est pour demain.

Fichtre ! on n’en a pas pour longtemps à vivre. C’est donc sérieux, décidément ?

Nous devons nous trouver après le dîner à un café de la place Saint-Michel. En effet, nous nous reconnaissons, le soir, en face de bocks dont nous regardons s’épanouir le faux col, et que nous vidons d’un air blasé.

« Vos hommes sont prêts ? » me demande tout bas un des affiliés.

J’ai un peu honte, je rougis légèrement. « Mes hommes ! » c’est bien solennel ! — J’ai horreur du solennel !

Ils se composent de quatre ou cinq étudiants jeunes, roses et gras que je ne connais pas.

Je suis leur chef, il paraît, mais je n’en sais guère plus qu’eux. On m’a jugé trop blagueur, ou bien Rock s’est souvenu de nos disputes cruelles en Décembre, et il n’a pas voulu que je jetasse mes boutades de