Page:Vallès - Le Bachelier.djvu/302

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des courbatures — des blessures piteuses font saigner mes pieds. C’est bête et honteux comme la fatigue d’un âne.


Je vais chez Duriol, au matin.

C’est un chétif, une tête faible ; il n’a ni opinion, ni envie d’en avoir. Comment se fait-il qu’il ait été mis dans le secret ?

Duriol me répète son histoire de la veille avec des variantes bizarres.

Il m’interroge moi-même et me demande ce que je sais.

« Halte-là ! »

Je n’ai rien à dire. Je ne connais personne, et je ne reverrai même personne d’un mois, en dehors de mes familiers. — L’affaire manquée, égaillons-nous !

Ça va mal.

J’apprends que Rock est sous clef. Il est vrai qu’il était à l’Opéra-Comique.

Ceux qui n’y étaient pas s’en tireront-ils ?

Legrand, Collinet, Duriol et moi, nous sommes les habitués d’une crémerie de la rue des Cordiers.

Nous y prenons depuis le complot des attitudes de viveurs, nous faisons des extras.

« Mère Marie, encore un Montpellier d’un rond ! »

Nous appelons de ce nom aristocratique un petit verre d’eau-de-vie d’un sou, faite avec du poivre et du vitriol ; nous lampons ça comme des gentlemen lampent un verre de chartreuse au Café Anglais.