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BERRY

Ou bien contre la ville, ou bien contre la Tour[1] ;
Tu n’as pas grand soucy que ton manteau se mouille. »

Je respondis : « Messieurs, je suis un escollier.
— Ah ! mordieu ! ce dit un, menons-le prisonnier.
Comment ! comment ! la nuit, aller battre l’estrade !

A ces motz je m’escarte et gagne une maison.
Eussé-je résisté ? Nenny, car, d’une oeillade
Jehanne seulette me mit bien en prison.


II

Je m’en vais à Charlet[2], auprès du quay aux Dames,
Et me promeneray par les prez d’alentour ;
Puis je m’iray coucher sous les arbres d’autour,
Que le soleil ne peut pénétrer de ses flames.

Beau soleil reluysant qui tout le monde enflames.
Je pourray t’esviter dans cet ombreux sejour.
Mais je ne pourray pas esviter cet amour,
Invisible soleil qui consume nos âmes.

Amour, ce petit Dieu qui surmonte les Dieux,
Le traistre, le meschant, il me suit en tous lieux !
Si je veux composer soubs ces ombres secrettes

Et chanter le brandon du soleil qui m’espoint.
Mes tablettes je prends : le méchant n’en a point,
Mes esprits et mon cœur luy servent de tablettes.

  1. La Tour, surnommée encore la Grosse-Tour, à Bourges, était fort élevée. Des auteurs prétendent qu’elle fut construite par César. Pendant les guerres de religion, elle fut l’objet des convoitises et des attaques des divers partis, ptetention qui explique le vers de Molin.
  2. Porte de la ville, percée dans une muraille élevée, paraît-il, par Charlemagne ; en sortant de Bourges par cette porte, on côtoyait la rivière d’Yevrette jusqu’au gué qui porte le nom de Gué aux Dames ; un faubourg et deux rues portent encore le nom de Charlet.