Page:Van Hasselt - Nouvelles Poésies, 1857.djvu/247

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Qu’enfant il avait vu, par une brume intense,
D’une barque danoise, amarrée en cette anse,
Une femme descendre, ayant pour compagnon
Un guerrier dont jamais il ne m’a dit le nom,
Et qu’il était ici pendant qu’ils prenaient terre
Et se glissaient tous deux dans la tour solitaire.
Or cette femme était Jutta. Depuis ce jour
Dans la ruine sombre elle fait son séjour.
De ces murs redoutés mystérieuse hôtesse,
On prétend que souvent Jutta la prophétesse,
Par quelque souterrain taillé dans le rocher,
Monte vers le château dont nul n’ose approcher,
Et que, Dieu lui prêtant sa force et sa science,
Elle interpelle Hacco comme une conscience.
Le jarl, assure-t-on, en a peur, et l’on dit
Qu’elle vient hardiment l’appeler le maudit.
Mais n’importe ; pour nous, pauvres gens des chaumières,
Sa charité féconde est pleine de lumières ;
Et, si parfois quelqu’un ne lit dans cet esprit
Que le langage obscur d’un livre mal écrit,
Qu’elle ait tous nos respects avec notre indulgence,
Yvor. Car la folie est une intelligence,
Et souvent l’insensé, des choses d’ici-bas
Voit le côté réel que nous ne voyons pas.