Page:Vandervelde - La Belgique et le Congo, le passé, le présent, l’avenir.djvu/132

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vernement déposait un autre projet, infiniment plus grave, car il avait pour but de débarrasser le souverain du Congo de tout contrôle et de toute ingérence du Parlement belge.

On se souvient qu’en 1890, sous le ministère de M. Beernaert, la Belgique avait fait à l’État du Congo une avance de 25 millions.

Mais, en échange de cette avance, la Belgique s’était vue reconnaître le droit d’annexer le Congo, à l’expiration du terme de dix ans fixé par la convention, de se faire donner, chaque année, des renseignements sur la situation économique et financière de l’État, et enfin, — point essentiel, d’intervenir dans la conclusion des emprunts, qui ne pouvaient être contractés sans son autorisation formelle.

Le Roi, cependant, ne tarda pas à se passer de cette autorisation, et le 25 novembre 1892, à l’insu des ministres, il emprunta, sous la forme d’une vente à réméré, 5 millions de francs à un homme d’affaires anversois, M. de Browne de Tiège. Mais, à la fin de 1894, la situation financière de l’État devint tellement difficile qu’il fallut avouer au gouvernement belge l’emprunt contracté sans son autorisation et lui demander en outre, la faculté de contracter des obligations nouvelles.

Le cabinet, à la tête duquel M. de Burlet avait remplacé M. Beernaert, estima que la Belgique devait plutôt reprendre immédiatement le Congo. Les ministres, réunis en conseil, le proposèrent au Roi. Le Roi accepta et donna sa signature au projet d’annexion.

Seulement, à peine cette signature était-elle donnée, que Léopold II, qui voyait augmenter rapidement les envois à Anvers de caoutchouc ou d’ivoire, et qui, d’autre part, voulait être libre de poursuivre ses projets de conquête vers le Nil[1], se mit à combattre, sous mains, la proposition qu’il venait de signer : des hommes à sa dévotion se rencontrèrent avec les radicaux et les socialistes pour s’opposer à l’annexion ; le

  1. Voir ce sujet le très intéressant article de M. A.-J. Wauters, dans le Mouvement géographique du 15 mai 1910.