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Page:Vanor - L’Art symboliste, 1889.djvu/10

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au subtil Jean Lorrain, mais ne surent convenir aux habituels louangeurs de Sarah Bernhardt.

Certes, l’art actuel, trop dédaigneux de tréteaux et de cymbales, sera banni désormais de la vedette. Trop nourri de sciences et de métaphysiques il ne saura plus aider la digestion du capitaliste obèse, ou animer la langueur du bain pour la fille.

Sans ces admirations lucratives, il végétera ironique et moqué avant que naissent de plus saines et de plus robustes générations d’intelligences.

Cependant Monsieur Pailleron trône.

Les lecteurs ont disparu. Jadis les nobles, grands connaisseurs d’art, bibelotiers savants, aimaient les livres. Aujourd’hui, à voir leur descendance si passionnée pour l'écurie et l’élève hippique, on évoque tristement le mot du prince de Conti, qui, devant un robuste palfrenier de son équipage disait : « Voici comme nous les faisons », et montrant dans une glace son effigie gibbeuse : « Voilà comme ils nous font. »

Les banquiers aiment à rire, après les sombres tragédies d’argent et les suicides d’honneur : il leur faut des pitres grivois. Leurs femmes inassouvies par l’égoïsme du mari, et le rachitisme de l’amant, aiment les niaises histoires de cœur, cette pornographie : il leur faut des pitres sentimentaux.

Hors la pitrerie point de succès.

Et pourtant, malgré les obstacles, des hommes peinent à parfaire des œuvres inaltérables. Et pourtant, des fois, ces œuvres sont remarquées.