Bourdelle découvre en effet, un beau jour, « qu’en ses murs gris et en ses volets verts, sa rue avait trois jeunes filles, des anges, ajoute-t-il. La brune, fière, sculptant le seuil qui m’accueillit ; la cordonnière, toute châtaine et toute rose ; la repasseuse, douce et blonde, en frissons d’or, qui coururent pour voir le sauvage étranger ».4 Ces anges s’appelaient Amélie, Maria et Jenny. Triples et innocentes amours qui se bornèrent à allumer dans une jeune âme une première flambée de poésie. « L’art est à la source du cœur», reconnaît plus tard Bourdelle, se souvenant de ses impressions d’adolescence4. La poésie et la sculpture, ce sont deux choses qu’il ne consentira jamais, désormais, à séparer l’une de l’autre.
Après des années de travail fécond mêlé de révoltes, une bourse d’études lui permet ensuite d’aller suivre les cours de l’École des Beaux-Arts de Paris. Sa jeunesse heureuse est terminée. Les années de lutte vont commencer.
On n’est pas surpris que ce petit ébéniste, mi-aegypan, mi-artisan et que Toulouse n’avait pas trop déformé, n’ait pas trouvé d’abord à Paris, à l’Ecole officielle où l’on essaie de dresser des artistes bien pensants suivant de sages recettes, le milieu qui lui convenait. Il entre d’abord à l’atelier Falguière. Bien qu’il ait gardé sa vie durant à Falguière sa reconnaissance et son estime, tout ici le rebute. « J’arrivai à Paris, nous dit Bourdelle.