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AVANT-PROPOS

La Régence de Zurich eſt deſcendue dans les moindres détails ſur ce que conſomment les Ouvriers, qui par état, emploient de la Colle de Farine, tels que les Cartonniers, les Relieurs de Livres, les Épiciers, à cause de leurs ſacs de papiers, les Vitriers, &c. Il leur eſt ſévérement défendu de ſe ſervir d’autre Farine que de celle qui ſe fait avec des Pommes de terre.

Cet objet, tout médiocre qu’il paroiſſe d’abord, est eſſentiel dans un Pays qui, comme la Suiſſe, ne produit pas assez de Bled pour nourrir ſes Habitans plus des deux tiers de l’année. Ce ne ſeroit pas même une économie à négliger en France, ſur-tout dans les grandes Villes & dans certaines Manufactures[1], où la quantité de Froment que l’on emploie à de la Colle de Farine, eſt fort conſidérable.

Peut-être feroit-on auſſi de très-bon Amidon, de l’Empois & de la Poudre à cheveux, avec des Pommes de terre.

Les Suiſſes ne ſont pas cependant les premiers ni les ſeuls qui aient imaginé d’employer des Pommes de terre à faire du Pain ou d’autres compoſitions économiques. Les Sociétés d’Agriculture, établies en diverſes Provinces du Royaume, s’en occupent depuis pluſieurs années, avec ſuccès.

Dès 1767, M. Muſtel publia à Rouen, un Mémoire intéreſſant, ſur les Pommes de terre & le Pain économi-

  1. « La Farine de Pommes de terre eſt préférable à celle de Froment, pour faire la Colle des Tiſſerans, parce qu’elle a cet avantage, eſſentiel de ne point entrer aussi aiſément que la Colle faite avec la Farine de Froment, dans une fermentation dont les progrès font pourrir les Toiles même ſur le Métier. »
    Voyez page 140, des Mémoires Hiſt. & Économ. ſur le Beaujolois, par Mr. Briſſon, Lyon 1770.