Page:Variétés Tome I.djvu/104

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prosperité, disoit ce grand philosophe, est un rapide torrent qui entraisne et bouleverse les esprits qui n’ont jetté des profondes racines au champ de la vertu, et qui d’un sang noble et genereux n’ont esmané leur origine. Mais sur tous ceux-là sont indignes de grandes fortunes et d’estre employez aux affaires publiques, qui ont pris leur estre d’un sordide concubinage ; ces aiglons adulterins n’osent regarder le soleil, et leurs foibles cerveaux se lassent au premier essor. Enfin, il faut conter entre les miracles naturels lorsqu’un infame bastard essaye d’amender par ses louables actions les defauts de son extraction. L’histoire suivante mettra le doigt du lecteur sur ces veritables propositions et realisera ses maximes.

Dom Rodrigo1 estoit fils de François Calderon, lequel estoit soldar en Flandres, et de Marie Sandelin, de nation allemande2, et fut engendré auparavant le mariage, mais depuis fut legitimé par celuy de son pere et mere. Il naquist en Envers, entre le


1. C’est le même que Le Sage a mis en scène dans Gil Blas, liv. viii, chap. 2–13, etc. Ce qu’il en dit, tout à fait d’accord avec ce qu’on va lire, prouve combien dans son roman il savoit respecter l’histoire. Cette pièce, qui peut servir utilement à commenter le chef-d’œuvre dans cette partie, n’a pas été connue de François de Neufchâteau, ou, disons mieux, de M. Victor Hugo, véritable auteur des notes du Gil Blas, que l’académicien mit sous son nom, faisant ainsi payer à l’enfant sublime la protection qu’il lui accordoit.

2. La mère de D. Rodrigue s’appeloit en effet Marie Sandelen. L’histoire dit qu’elle étoit Flamande.