Page:Variétés Tome I.djvu/116

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tions, il les encourageoit et les consoloit luy-mesmes, desprisant les grandeurs et vanitez de ce monde, les figurant comme une ombre ou une fumée au prix de celles de la beatitude eternelle, tellement qu’il attiroit le peuple à si grande compassion, qu’ils avoient plus de doleance de son infortune qu’il n’avoit luy-même à la mort que il alloit librement souffrir. Aussi ceste generosité, que les plus offensez remarquèrent en luy, servit d’eau pour esteindre le feu de leur animosité. L’executeur des hautes sentences criminelles luy menoit lui-mesme sa mule par la bride, estant l’ordre et la coustume du dit païs quand c’est quelque homme de qualité qui a acquis quelque supresme degré, ainsi que cestuy-cy avoit ; et, commençant à marcher ce funèbre arroy (bien que la multitude du peuple les empeschât assez), le crieur public, à son accoustumée, commença à s’escrier tout haut, à prononcer sa sentence, avec les crimes qu’il avoit miserablement commis, disant ainsi :

« Voicy la justice que fait faire le roy nostre sire à cet homme, pour en avoir fait massacrer miserablement un autre, commetant delicts d’assassinat, et avoir esté coupable en la mort de plusieurs personnes de remarque, soit pour en avoir commis plusieurs et diverses offences, lesquelles ne doivent estre declarées, et sont reservées en secret dans le procès, pour lesquelles il est condamné à estre degorgé pour son chastiment, afin qu’il puisse servir d’exemple à ceux qui commettront un tel excez ; qui tel fera, ainsi le payera. »

Il arriva à l’échafaud. Le père maistre frère Gre-