Page:Variétés Tome I.djvu/20

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de nos procureurs, chicaneurs, appariteurs et garde-nottes, qui estendent et pourfillent le miserable cahyer, pour faire valoir leurs escritures. Juxta illud odor lucri bonus est ex re qualibet, que quelque maleficié et morfondu presente une pistole à son medecin pour son ordonnance, jaçoit qu’elle soit petite et rongnée contre la reigle hic et hac et hoc nimis, au diable s’il en fait refus : donum quodcumque sumendum. Voylà, voilà : les maximes d’accipe, sume, cape, sont cejourd’huy si ressentes et familières, qu’on est contrainct d’avouer à monsieur le bachelier, pour la peine de ces recipez, materiam non formam, si mieux il ne vouloit recevoir du febricitant stercus aureum en champ de gueule.

N’en déplaise à messieurs nos courtisans, ils ayment aussi les choses petites, le chapeau petit, la barbe petite en queue de canard, le petit manteau à la clisterique2, la petite espée, et, foy de Platon, le plus souvent la bourse si petite, qu’il ne se trouve rien dedans, suivant ces mots : À demain, je n’ay point de monnoye, les pistoles me font ombre. Que feroit-on là ? Il faut confesser qu’aujourd’huy vanitas vanitatum et omnia vanitas. Leurs lettres amoureuses s’appellent poulets, in diminutivo, et non pas chappons3, où avecque peu de discours ils font espanouyr ceste rose qui fleurit tous les moys.



2. La forme écourtée des manteaux dont on parle ici, et qui, ne descendant guère plus bas que les reins, eussent été si favorables aux apothicaires qui poursuivoient Pourceaugnac, fait comprendre de reste le sens de ce mot clistérique.

3. On avoit dit aussi chappons pour lettres galantes ; on les écrivoit surtout en vers. Il s’en trouve plusieurs dans les