Page:Variétés Tome II.djvu/66

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que le puissant et souverain Dieu se vouloit servir de luy pour executer sa volonté divine, après avoir bien examiné l’affaire, il jura la mort de ce malheureux perfide, desjà condemné par sentence de son prince, duquel il s’estoit rebellé. S’offrant donc l’occasion de luy porter des lettres de la mort de Monsieur, frère du roy de France5, duc d’Alençon, comme il se fut accosté des gentils hommes de sa cour, le dixiesme jour de juillet, demi-heure après midi, sortant Nanssau de sa table, Balthazar luy tira un coup de pistolet chargé de trois balles, qui luy fît un trou soubs la mamelle gauche de deux doigts de largeur6, dont il mourut7 ; et comme Balthazar le vit tomber du coup qu’il luy donna, se voulant sauver, fut incontinent attrappé auprès des murailles de la ville8, mais sans s’estonner aucunement. Armé d’un incredible courage jusques au dernier soupir,


5. « Atque extincto Alenconio, obtulit se delaturum ad Orangium litteras aliquorum Alenconii familiarum de obitu ejus. » (Strada, ibid.)

6. Ceci, à quelques détails près, est encore conforme au récit de Strada. Pour exprimer la manière dont Guillaume de Nassau, sortant de table, fut frappé au cœur par les balles du pistolet de Gerard, le jésuite romain se sert de cette singulière phrase : « Assurgentem ab epulis, exeuntemque in aulam, fistula in cor explosa trajicit, confecitque. » Heureusement qu’il met en marge le mot italien pistola.

7. Guillaume tomba mort aux pieds de sa femme, fille de l’amiral Coligny, qui avoit vu de même assassiner son père dans la nuit de la Saint-Barthélemy.

8. « Evolantem inde, jamque egressurum urbe, stipatores insecuti retrahunt. » (Strada, ibid.)