Page:Variétés Tome IV.djvu/38

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Car, selon que l’on frippe on paye le gibier,
Le noble tout autant que le plus roturier.
Quand c’est semblable laine, autant vert comme jaune.

Ainsi bien manioit vostre grand-père l’aune. »

À vray dire, ces fats sont quelquefois issus
D’un esperon, d’un lard, d’un ventre de merlus,
D’un clistère à bouchon, d’un soulier sans semelle,
D’une chausse à trois plis, d’un cheval, d’une selle,
D’un frippier, d’un grateur de papier mal escrit,
D’un moyne defroqué, d’un juif, d’un ante-christ,
D’un procureur crotté, d’un pescheur d’escrevice,
D’un sergent, d’un bourreau, d’un maroufle, d’un suisse,
Et cependant ils font les beaux, les damerets,
Et ne pourroient fournir pour deux harencs sorets.
Mais lisez vos papiers, vos pancartes, vos tittres,
Et vous vous trouverez tous issus de belistres,
Mille fois plus petits encor que des cirons
Et plus nouveaux venus que jeunes potirons ;
Qu’il vous faut humer fraiz comme l’huistre en escaille,
Et que vostre maison n’est pas une anticaille.
Venons sur memento, nous sommes tous cinis,
Mais d’un reverteris gardez d’estre punis.
Qui faict plus qu’il ne peut au monde de despence,
Il a plus qu’il ne veut au monde d’indulgence.
Pour amortir l’orgueil de mille vanitez,
Considerons jadis quels nous avons estez,
Et, faisant à nature une amende honorable,
Dis, superbe : J’estois vilain au prealable
Que d’estre gentilhomme ; et, puisque de vilain,
Je me suis anobly du jour au lendemain,
Du jour au lendemain je peux changer de tittre
Et de petit seigneur devenir grand belistre,