Page:Variétés Tome VI.djvu/257

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en une rue abboutissant en la rue Sainct-Martin, qui est la penultiesme d’auprès Sainct-Nicolas5, où je remarquay une admirable querelle entre le maistre et le clerc ; et quoy qu’elle proceda de fort peu de chose, le superieur s’efforça à faire jouer les ressorts du poignet au maniement de M. Martin Baston6 ; mais le mal fut pour luy que l’inferieur, renforcé en une resolution provoquée diverses fois par la prise d’une medecine bachique, se rendit possesseur de ce M. Martin, laquelle possession luy ayant accreu le courage, il fit voir que son adversaire en avoit plus que de force, et de presomption que d’effect. Il est vray qu’il ne fut pas si vilainement accoustré que le satyre Marsias par Apollon : aussi la contestation n’estoit-elle survenue pour le jeu des flustes, puisque cela procedoit de la mauvaise opinion d’un cocuage. Toutesfois, je vous asseure (s’il n’y a point d’erreur en mon calcul) que jamais vilain ne fut si delicatement epousté. La rencontre me fut grande en ce logis, car cette action ne fut pas si tost close par la sortie de l’epousteur, qu’un incident relevé en bosse par le merite du subject parut, procedant de la reception faicte par la procureuse de quatre testons envoyez pour une presentation ; ce qui fascha tellement monsieur, qui avoit l’imagination grandement preoccupée de l’asseurance de les toucher, que, s’en voyant descheu, il se constitua en une al-


5. C’est, par conséquent, la rue Jean-Robert.

6. C’est dans Rabelais (liv. 3, ch. 4) que nous trouvons pour la première fois cette expression, si bien reprise par La Fontaine, liv. 4, fable 5.