Ô tourment ! ô rage ! ô fureur !
Ô parents qui me vistes naistre,
Que ne m’arrachiez-vous le cœur
Au moment que je receus l’estre.
Mère qui m’avez enfanté,
Vous m’eussiez alors exempté
Des malheurs sous qui je succombe
Si par le tranchant d’un cousteau
Vous m’eussiez tiré du berceau
Pour me porter dessous la tombe.
Que faisiez-vous dans les deserts,
Tygres, où cherchiez-vous des vivres,
AÏors que mon esprit pervers
Diminuoit les sacrez livres ?
Quand je voulus les effacer,
Et que je les osay placer
Au rang des choses apocriphes,
Vous deviez déchirer mon flanc ;
Ce forfaict de mon propre sang
Devoit estre escrit par vos griffes.
Helas ! si je pouvois trouver
La sortie de ce dedale
Où mon sort me fait reprouver
Tout ce que l’on feint de Tantale,
J’irois vous revoir, ô mortels !
Pour immoler sur vos autels
Mon cœur et mon visage blesme.
Ils brusleroient au lieu d’encens
Et de tout le cours de mes ans
Je ne ferois qu’un seul caresme.