En se faschant soudain courut après.
Luy, chausses bas, que la fureur transporte,
Les poursuivit jusqu’au pas de la porte,
Où, rencontrant un momon8 gracieux
De gens masquez, qui faisoient les doux yeux,
Et le mary, qui vient en taille douce,
De gros osiers donne mainte secouce
Dessus les bras, sur le cul, sur le dos,
L’initiant comme prince des sots.
Vous eussiez dit, en les voyant combatre,
De mareschaulx qui se plaisent à batre,
L’un après l’autre, en cadance suivant,
Et que l’enclume estoit Angoulevent.
Il crie, il bruit, d’eschaper il se paine ;
Mais c’est en vain : ils reprennent halaine,
Et, de plus beau fustigant rudement,
Font de son corps des chausses d’Allemant9 ;
Et le barbier, qui voit besongne faitte,
Droit sur la rue aux fenestres se jette,
8. On se servoit du mot momon, comme ici, pour désigner une bande de masques, ou, comme dans le Bourgeois gentilhomme, acte V, sc. 1, pour désigner le mannequin, sorte d’idole carnavalesque, que les masques traînoient avec eux. On connoît la fameuse farce attribuée à Sigongne : Le Balet des Andouilles portées en guise de momon, 1628, in-8.
9. Les chausses à l’allemande étoient toutes couvertes de ces crevés, descoupures et esgratignures dont la mode avoit fait si grande fureur au 16e siècle, et que Marie de Romieu recommandoit comme le suprême de l’élégance dans les accoustrements. V. son Instruction pour les jeunes dames, 1573.