Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/238

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envoyer à Paris par avion ; et par voie ferrée, la vitesse commerciale des trains atteignant péniblement vingt kilomètres à l’heure, le Nouvelliste de Lyon, le Moniteur du Puy-de-Dôme et les Dernières Nouvelles de Strasbourg dataient de la veille et ne contenaient guère que des actualités périmées.

Il y avait bien les hauts-parleurs, interdits en temps ordinaire sur la voie publique mais tolérés pour la circonstance, qui beuglaient les nouvelles aux passants. Ceux des grands quotidiens, entre autres, prétendaient suppléer momentanément les éditions sur papier. Mais une censure rigoureuse devait s’exercer, car les nouvelles étaient uniformément optimistes. À les entendre, la « loi électrique » était scrupuleusement obéie par toute la France et le fléau était conjuré. Encore un peu de patience…, etc.

On se sentait plus isolé des faits vrais que par les communiqués officiels de la guerre. Le désir d’être renseigné, l’espoir de trouver quelqu’un qui eût vu ou appris des choses, de témoins oculaires dignes de foi, poussaient à errer à la recherche des amis ou connaissances ; et sous le moindre prétexte ou même sans prétexte, à lier conversation avec le premier venu.

Quant à moi, j’essayai bien de voir quelques camarades, mais ils n’en savaient pas plus que moi, et je me lassais rapidement de tout entretien où je ne pouvais faire intervenir bientôt le nom d’Aurore. Deux fois en trois jours, j’allai rue Legendre, dans l’espoir de